Du bruit sur la ligne, un grésillement désagréable. Il faut que je raccroche, quelqu’un m’écoute. Sur écoute, je suis sur écoute. Plus rien, grésillement se tait. Je vérifie que les portes sont fermées à clef. J’éteins toutes les lumières.

J’attends, assis dans le fauteuil en velours gris. Est-ce que je me suis assoupi ? Soudain je me redresse, j’ai cru entendre un bruit. Ca gratte quelque part. Ca gratte à répétition. Je fais le tour de la maison, l’oreille aiguisée comme un couteau. Je n’entends plus rien.

Alors, je me dirige vers la bibliothèque et j’appuie sur le livre que moi seul connaît. Un “clic” se fait entendre et je pousse sur l’étagère. Un passage s’ouvre devant moi, je m’y engouffre sans bruit en refermant derrière moi. Sur les murs, des mots, des phrases, des numéros de pages. J’avance parmi les couloirs alphabétiques. Les ambiances varient au gré de mes pas. Parfois feu de cheminée, parfois pourriture, parfois chaleur, parfois glacier. Je retrouve l’endroit de ma première fois avec les mots. J’entends gratter, mon téléphone vibre. Je retrouve l’odeur de la colle en pot, le visage de madame Lièvre, la douceur des marrons qui jonchent le sol de la cour. Il faut faire vite. Je me colle au mur sur lequel des lignes de a s’inscrivent et je plonge dans l’année 1984.