ROMAN
#2
: : PARIS
Paris, la ville qu’on aime et qu’on déteste. Ou qu’on aime détester. Comme beaucoup de Parisiens, je ne suis pas originaire de Paris. Je viens de la “province” (on parle aujourd’hui de “régions”) et lorsque j’ai débarqué à 20 ans, je n’aurais jamais imaginé faire ma vie à Paris. C’est une histoire d’amour qui m’a conduit à la Capitale. Et une autre histoire d’amour qui m’a permis d’y rester ! Je crois que de moi-même, je n’aurais jamais osé m’aventurer dans cette ville, au cœur de multiples légendes et fantasmes. On en dit tellement de choses: elle est polluée, il y a trop de monde, on y mène une vie déglinguée, on s’y drogue, on y vit à cent à l’heure, on a le temps de rien, on devient con, on devient hautain, méprisant, on y gagne beaucoup d’argent, les loyers y sont démentiels, etc etc etc.
Plus de 20 ans après, je m’inscris en faux : Paris est magnifique, Paris peut être apaisée/apaisante. J’irais plus loin, je livre même un secret : Paris se fait le miroir de notre humeur, le miroir de nos angoisses, miroir de nos incertitudes. C’est pour cela qu’on l’aime et qu’on la déteste, c’est pour cela qu’on veut y vivre et qu’on veut la fuir. Elle nous ressemble.
Dans le roman #2, Maxime, le protagoniste, a été façonné par Paris. Il y vit au grand jour mais aussi en souterrain, à la recherche des corps, à la recherche de l’amour, tout en croyant berner son amie Béatrice qui connaît pertinemment les habitudes de Maxime.
: : L’évasion
S’évader… Qui n’y pense jamais? Qui ne le fait jamais? C’est le coup de folie, la réponse à la pulsion, cette petite voix qui dit “rien à foutre je me barre”, ce sont des minutes, des heures parfois à tenter d’oublier une réalité qui parfois nous incommode. Dans le roman #2, le fait que l’intrigue ait lieu au Sénégal est déjà une ode à l’évasion. Maxime, le protagoniste, ressent le besoin de s’évader, de fuir une réalité présente pour retrouver un souvenir.
Mais dans ce roman, le personnage qui caractérise peut-être le mieux l’idée d’une évasion nécessaire, c’est Colette, la mère de Max. Femme cassée, elle cherche à travers ses voyages à oublier quelque chose, à retrouver une respiration coupée, à profiter de petits moments de vie. Évasion nécessaire, source d’imagination. Ecrire ? Pour moi, c’est m’évader, revoir des lieux, imaginer encore, poursuivre des conversations finies depuis longtemps, trouver une version 2.0 à des réalités 1.1. Il me fallait un personnage qui aide, qui vienne en renfort avec quelques connaissances de filature, mais je ne souhaitais pas qu’il soit parfait ou qu’il connaisse son métier sur le bout des doigts. Au contraire : je le voyais embarrassant, maladroit, pas très sûr de lui, mais avec de bonnes intuitions.
: : le sénégal
Premiers souvenirs marquants de vacances à l’étranger, je suis adolescent. Je découvre la Grande Altérité, un pays totalement différent du mien, des habitudes étrangères, un rythme inconnu, une chaleur inespérée. J’y retourne plusieurs fois, j’y retrouve à chaque fois et la même magie, le même éloignement, le même dépaysement, la même simplicité. J’aime sa nourriture, son soleil, ses sourires, ses odeurs, ses musiques, et ses beautés. C’est pourquoi le Sénégal, et plus particulièrement la Petite Côte, est le décor principal de ce roman #2. J’avais besoin d’être ailleurs, de retrouver des sensations lointaines, de me bercer de chaleur et de djembés. Et sous les bougainvillées, entre deux baignades dans un océan Atlantique particulièrement chaud et salé, il se pourrait bien qu’une histoire de cœur se faufile l’air de rien entre les lignes…
: : la piscine
Cet élément assez central pour le héros de ce roman #2 a une histoire intéressante. Lorsque j’ai écrit ce roman, j’avais une vision assez précise du lieu, et au fil des réécritures j’ai souhaité l’animer, le personnifier. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque je suis retombé sur une nouvelle écrite en 1996 dans laquelle une piscine était déjà un personnage principal ! J’avais oublié ce détail, mais mon inconscient, lui, se rappelait, puisque c’est quasiment dans les mêmes termes que la piscine de 2021 et celle de 1996 sont décrites. Incroyable chemin de l’écriture…
: : canidés
Partenaires de vie privilégiés depuis l’enfance, les chiens sont une référence, un soutien, un apport inconditionnel d’amour, de réciprocité et d’étayage. Pour des enfances carencées, il semblerait scientifiquement prouvé que la présence de chiens change considérablement la façon dont le moi de l’enfant se développe. Alors je les aime, je m’en occupe, je les regrette, ils me manquent, je redoute leur départ, et j’apprécie jour après jour leurs folies, leurs énervements, leurs jeux, leurs besoin de câlins. La vie sans canidés? Impossible. Et même si le roman #2 ne comporte aucune allusion canine, il n’en est pas moins vrai que dans ma vision intérieure du décor de Saly Portudal, quelques canidés se promènent sur la plage.
Les hommes, leur présence, leur absence. Paul, par exemple, est un personnage central de ce second roman et pourtant le lecteur comprend très rapidement qu’il est … absent.
: : les hommes
Les hommes, leur présence, leur absence. Paul, par exemple, est un personnage central de ce second roman et pourtant le lecteur comprend très rapidement qu’il est … absent. On pressent un drame, on ne sait pas lequel. Mais tout le roman est tourné vers l’amour porté par Max envers Paul, cette première histoire d’amour douce-amère. Max y décrit ce qu’il aime chez l’homme, ces détails parfois subtils et si importants, les lignes d’un cou, la douceur d’un regard. Et puis il y a Abdou, l’autre homme important, avec qui Maxime développe une histoire d’amitié. Il est géant, protecteur, présent et attentif. Max et Maxime aiment les hommes et je ne pouvais que rendre hommage à cet amour.
Les hommes, leur présence, leur absence. Paul, par exemple, est un personnage central de ce second roman et pourtant le lecteur comprend très rapidement qu’il est … absent. On pressent un drame, on ne sait pas lequel. Mais tout le roman est tourné vers l’amour porté par Max envers Paul, cette première histoire d’amour douce-amère.
<
: : CHRONOS : :
Le temps qui passe, qui s’arrête. Le temps passé, qui ne reviendra pas. Le temps futur, source de tracas, de questions, de projections. Dans l’écriture, le temps se matérialise notamment à travers les photos : elles montrent un temps passé, figé, certes, mais qui informe le présent de quelque chose qui va avoir lieu. C’est cela qui est intéressant dans les photos, ou bien dans les images-souvenirs, ces moments gravés qu’on ne peut oublier. Ce sont des informations du passé à propos d’histoires qui vont se dérouler et dont on connaît l’issue. Max, adolescent, Maxime quarantenaire, le temps a filé, que reste-t-il de Max en Maxime ? Maxime existait-il déjà en Max ?
: : ça va ?
: : ça va !
Cette phrase automatique, “ça va ?” qui peut aussi être la réponse: “ça va !”. Mais qu’est-ce qui va? C’est quoi, “ça”, dans ce “ça va”? Dépersonnaliser autant le rapport humain, ne pas être en capacité de formuler une adresse précise, un “comment vas-tu?”, c’est un symptôme de notre société et, comme souligné dans le roman, Maxime trouve cette habitude pour le moins énervante. “Ça va” est le témoin des distances interpersonnelles, de la fuite de l’humanité dans les liens. C’est poser la question sans vouloir de réponse, c’est balayer l’autre, sa potentialité de drames ou de joies. Au “ça va” automatique, avez-vous déjà répondu par la négative, histoire de voir ?